samedi 17 septembre 2011

LAST ACTION HERO de JOHN MC TIERNAN (1993)


LAST ACTION HERO de JOHN MC TIERNAN (1993)

Dany Madigan, onze ans, est un passionné de cinéma, un véritable fanatique surtout de films d'action, préférant même sécher les cours pour les voir et les revoir pour la énième fois même si il les connait par cœur, en ignorant les mises en gardes de sa mère qui peine à joindre les deux bouts pour les faire vivre.

Il va se voir offrir l'opportunité exceptionnelles par le biais de son ami, projectionniste de la salle décrépie dont il est un habitué, de voir en avant-première le nouveau chapitre de sa saga fétiche mettant en scène son héros favori : Jack Slater interprété par son idole absolue, l'acteur Arnold Schwarzenegger.

Lors de cette première Dany, excité de découvrir avant tous le monde JACK SLATER IV, va recevoir des mains de son ami un billet prétendument magique et hérité hypothétiquement du célèbre magicien Harry Houdini.
Non seulement ce billet est véritablement magique, mais de plus va le propulser là où ses rêves les plus fous vont devenir réalité : aux premières loges, au milieu même du film, aux côtés de son légendaire héros!


LAST ACTION HERO fait parti de l'infortunée liste de ces films maudits, véritable échec commercial en salle, détruits par la critique à sa sortie, rejeté et boudé par le public auquel il semblait à la base pourtant être destiné qui préférera s'extasier devant les dinosaures de JURASSIC PARK, et considéré hâtivement comme un gros blockbuster de plus au budget honteusement faramineux et sans âme.

Ça c'était en 1993, car aujourd'hui le film a retrouvé grâce au bouche à oreille au fil des années et surtout à la ténacité des cinéphiles éclairés amoureux du Genre un statut culte qui lui est légitimement dû, et est même considéré à présent comme une référence absolue dans le domaine et ce n'est que justice rendue!

Pas étonnant ceci dit que le film se soit planté en salle à l'époque, surtout aux Etats-Unis, dont le box office faisait alors référence encore plus qu'aujourd'hui, influant même sur la distribution des métrages dans le reste du monde, le film étant alors vendu, ou plutôt attendu à la base comme un véritable événement, un véritable concentré d'action totale et décomplexée.

Le public bouffeur de pop-corn découvre alors en salle un film qui au lieu de ça déconstruit les Actionners, démantibule  leur mécanique, met en valeur les incohérences et les aspects improbables liés au Genre en mettant en lumière le côté too much de ses héros et vilains, avec de plus en tête d'affiche, l'un de ses représentants les plus prestigieux, l'une de ses icônes emblématiques et incontournables d'alors, l'immense Arnold Schwarzenegger!


Sur le coup difficile pour tous ces spectateurs américains venus uniquement se divertir et se distraire de sourire autrement que jaune, puisque LAST ACTION HERO est alors perçu par ces derniers comme une attaque des fondements même de ce qui fait l'attrait de leur cinéma national, leur chère culture, et pour enfoncer le clou, c'est le réalisateur des plus grands Actionners du moment qui se trouve derrière la caméra, John Mc Tiernan, celui-là même à qui l'on doit des bombes représentatives du Genre et même qui l'ont révolutionné comme avec DIE HARD ou PREDATOR!

La pilule ne passe pas et LAST ACTION HERO ne récoltera que 50 millions de dollars au box office ne rentabilisant pas son budget initial de 85 millions, et sera vite considéré comme un échec et finira donc aux oubliettes...

Pourtant le film semble simplement avoir raté son véritable public, ou plutôt mal avoir été jugé et mal interprété, car LAST ACTION HERO n'est pas une critique du Genre péjorative mais est au contraire bel et bien un véritable cri d'amour, un hommage satirique et parodique parfois certes, mais simplement lucide et affectueux dans l'approche de son sujet, d'une intelligence rare et qui fait preuve d'énormément de tendresse envers tous ces fameux Actionners justement et ses fidèles spectateurs!


Dany Madigan, remarquablement interprété par le jeune Austin O'brien, est comme beaucoup de cinéphiles un jeune garçon qui tente juste de fuir la réalité de sa vie si ennuyeuse et si maussade. Il vient simplement chercher de la distraction et du rêve en s'installant dans ces salles obscures. Difficile alors pour nous spectateurs de ne pas s'identifier à lui immédiatement avec tendresse car c'est exactement ce que nous-mêmes sommes venus chercher en regardant LAST ACTION HERO.

Tous les signes extérieurs d'ailleurs sont là pour renforcer cette identification, Dany étant un passionné absolu du genre s'extasie devant, JACK SLATER IV, le film dans le film et séquelle d'une saga à succès avec en tête d'affiche la superstar Arnold Schwarzenegger, anticipant le déroulement du scénario en sachant pertinemment et en connaissance de cause que son héros s'en sortira vaille que vaille sans une égratignure malgré les explosions et les pluies de balles, jusqu'au moment fatidique où le fameux ticket magique l'éjecte de façon impromptue là où tous cinéphiles rêvent d'être : dans le film, au côté même de son idole de fiction, au cœur de l'action, lancé en pleine course-poursuite!

On jubile littéralement tout comme Dany qui se retrouve alors dans cet univers qui le fait tant rêver mais, et l'intelligence du scénario vient de là, ce dernier est parfaitement lucide sur sa situation et rapidement confronte la réalité qu'il connait à cette vie totalement factice qui pourtant l'attire à la base et participe à son plaisir de spectateur en salle, en tournant en dérision l'absurdité des situations et en mettant en évidence les incohérences totalement improbables absentes de notre monde bien réel.


C'est là où le script fait preuve d'une subtilité intéressante car en voulant démontrer à Jack Slater qu'il est dans un film, Dany nous révèle à nous spectateurs bien réels de LAST ACTION HERO ce qui fait finalement tout le charme de cette catégorie de métrages, les Actionners, en pointant du doigt et en démontant tous ses rouages et même si le ton paraît moqueur, il est surtout utilisé là pour nous éclairer sur ses fonctionnements absurdes totalement surréalistes qui parfois d'ailleurs pouvaient nous échapper à nous... Il faut se l'avouer, à l'époque on se sentait un peu idiots sur le moment d'avoir avalé sans broncher autant de films qui utilisent ces mécaniques et ces grosses ficelles systématiques!

Tout y passe, du supérieur black qui hurle de façon inintelligible, aux jolies filles aux mensurations de top models qui arpentent les rues de la ville toutes plus superbes les unes que les autres et souvent habillées de façon outrancièrement sexy, ou encore les locaux du commissariat pimpants et ultras luxueux où Dany croise le mythique T-1000/Robert Patrick de TERMINATOR 2 et la sulfureuse Catherine Tramell/Sharon Stone de BASIC INSTINCT et même un personnage félin animé!

Il est alors jouissif pour le cinéphile averti d'assister à cette déconstruction des clichés du Genre, tant les références cinématographiques abondent à l'écran, parfois de manière subtile, quelles soient visuelles, narratives ou même sonores.


Mais c'est loin d'être le seul intérêt du film de Mc Tiernan qui au-delà de cette analyse caustique n'en oublie pas le spectacle et son intrigue, puisque Dany n'arrivant pas à prouver ses dires, va alors tout simplement profiter de cette opportunité et vivre l'aventure aux côtés de son héros fétiche, l'aidant dans son enquête en se servant de ses connaissances de cinéphile, en anticipant les réactions et tous les événements à venir, faisant fi du déroulement narratif prévu à l'origine.

Ces passages donnent lieu à des moments d'anthologie totalement hilarants, notamment lorsque Dany saute les étapes traditionnels de l'investigation en montrant simplement à Slater la maison où trouver le bad guy du film, normal puisqu'ayant assisté à une partie de la projection du film celui-ci connaît déjà  les tenants et les aboutissants de l'affaire au contraire de son héros qui lui suit à la ligne le déroulé du script.

Il va alors chambouler le récit par ses interventions totalement imprévues et attirer se faisant l'attention des vilains de l'histoire fictionnelle, surtout celle de Bénédict dit "l'homme à l'œil de verre", inévitable tueur à gage que l'on retrouve sous une forme ou une autre dans tous les films du Genre et campé par le charismatique Charles Dance de façon magistrale et inoubliable!


L'intrigue pousse donc le vice à retourner la situation, et cette fois c'est un personnage fictif, qui plus est vilain, qui va prendre conscience que quelques chose ne tourne pas rond et que Dany n'a pas sa place dans son univers, va finir par découvrir que ce gamin vient du monde réel et faire le chemin inverse en s'y rendant donnant à Mc Tiernan une nouvelle occasion de développer son concept en confrontant son héros factice aux dures règles inhérentes de notre réalité avec tout ce que cela implique incluant l'absence d'invulnérabilité de ce dernier, douleur, fatigue, souffrance, et même la mort potentielle...

Cette partie change donc radicalement de ton en quittant le terrain de la comédie, et Tiernan se sert à présent de ses personnages fictifs pour nous rappeler à nous spectateurs que notre monde est loin d'être rose et que nous en sommes de plus les véritables acteurs infortunés, poussant le bouchon jusqu'à montrer que notre réalité est bien plus propice aux injustices et autres exactions impunies et qu'ici le bien ne triomphe pas forcément du mal, bien au contraire...

On imagine bien que les spectateurs, en particulier celui américain, ont moyennement apprécié cette dure réalité des choses, car et rappelons-le, ils étaient venus pensant uniquement se distraire et non pas pour qu'on leur rappelle le sombre quotidien auquel ils sont confrontés tous les jours.


Schwarzenegger joue d'ailleurs à ce moment son propre rôle et fait étonnamment son autocritique, se fustigeant à l'écran en confrontant ses deux incarnations, fictive et réelle.
Il fait preuve d'une interprétation exceptionnelle dans ces deux rôles bien distincts et nous interpelle à plusieurs reprise sur les raisons qui pousse ces films d'actions à être réalisés, pour nous satisfaire avant tout, nous public avides de sensations fortes!

Le personnage de Slater s'interroge même alors sur les raisons pour lesquelles les scénaristes lui ont brutalement retiré son fils le faisant mourir dans d'atroces circonstances, nous confrontant et nous mettant dans une position inconfortable et coupable puisque ce genre de drame narratif participe pour nous spectateurs à rassasier nos émotions, élément scénaristique simplement là pour nous faire ressentir de l'empathie envers le héros en souffrance.

Mais Mc Tiernan une fois de plus n'en oublie pas ce qui fait l'intérêt de tous ces films dont il démonte les codes : la part de magie! Et c'est bien elle qui au final viendra livrer un touchant happy ending, nous rappelant ce faisant que quoi qu'il en soit tout cela n'est que du cinéma, du grand spectacle, avec sa part de rêve obligatoire et que son héros, pourtant confronté à la mort personnifiée elle-même (toute droit sortie d'un film d'Ingmar Bergman LE SEPTIÈME SCEAU et interprétée de manière classieuse par Ian Mc Kellen himself ) est là avant tout pour divertir et faire rêver.

On assiste alors à une des scènes les plus émouvantes du métrage lorsque Slater, mortellement blessé, demande à son jeune fan Dany de retourner dans son monde réel, dans cette salle de cinéma ou tout à commencé, là où il croira toujours en lui et le fait vivre se faisant, nous rappelant que nos héros sur pellicule sont bel et bien éternels tant qu'on y croit nous et que l'on continue inlassablement à s'assoir dans les salles obscures à leur recherche...


Remarquablement réalisé,  Mc Tiernan ayant enfin les moyens de ses ambitions, LAST ACTION HERO s'offre de plus un casting de rêve à tous les niveaux incluant la fine fleur de l'époque, des caméos d'exceptions à la pelle, un score magnifique intégrant un thème inoubliable pour Slater du regretté Michael Kamen ( d'ailleurs lui-même spécialiste du Genre puisqu'on lui devait déjà ceux des ARME FATALE ), appuyé par une soundtrack aux accents hard rock impérissable et aligne les séquences et les répliques instantanément cultes et ce à un rythme soutenu, sans le moindre ralentissement.

Certains verront une mise en abîme du Genre alors que d'autres y verront plutôt une auto-analyse intelligente et un hommage à tout un pan de cinéma. Peu importe car quoi qu'il en soit Mc Tiernan démontre qu'il fait preuve de beaucoup de lucidité concernant un Genre dont il est lui-même l'une des figures emblématiques et s'assume totalement faisant preuve d'auto-dérision avec franchise et ironie, tout comme l'immense Arnold Schwarzenegger, et ce n'était pas chose évidente d'avoir le recul suffisant considérant que les deux stars étaient alors au sommet de leur gloire.

18 ans après le spectacle reste intact et semble même avoir été tourné cette année, tant visuellement le spectacle est complet, le blu ray offrant de plus une image d'une limpidité ahurissante tenant compte du rendu en salle et facilement trouvable neuf dans les dix euros mais malheureusement sans le moindre supplément,  l'essentiel étant de toute façon le film lui-même.

LAST ACTION HERO est définitivement une des œuvres les plus puissantes et maîtrisées de Mc Tiernan et, aussi dingue que cela puisse paraître aujourd'hui, finalement le dernier vrai représentant de cette époque bénie, le dernier vrai héros du genre justement, presque une conclusion ultime en somme qui forcément met donc la larme à l'œil lors de son (re) visionnage et s'avère être un des derniers véritables monuments du cinéma d'action à l'ancienne comme l'annonce le titre!

Dire le contraire serait, comme dirait Slater, une MONUMENTALE erreur!


NOTE GLOBALE : 19/20

DÉDICACE À BRUNO "JUSQU'AU BOUT DU RÊVE" DUSSART

Luke Iron Mars
(qui malgré son âge avancé a jubilé devant LAST ACTION HERO POUR LA 32145 FOIS et a su garder son âme d'enfant!)

8 commentaires:

  1. Critique absolument croustillante et impériale tant elle est pleinement justifiée, lucide et pertinente. Une chose nous vient à l'esprit après avoir lu ce magnifique clin d'oeil au cinéma d'action, l'envie irrésistible de le revoir à nouveau. C'est ce que je ferais prochainement de toute évidence. Merci Luke pour la dédicace, j'en suis très honoré ! ^^

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  2. C'est pour moi ta critique la plus réussie et passionnante !

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  3. Oh, ben merci, sachant qu'elle t'était destinée j'ai été plus méticuleux... je dois avouer que j'ai galéré car j'avais tellement à dire... d'ailleurs je me suis retenu lol J'espère très vite lire ta critique de cette bombe de Mc Tiernan!

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  4. Un chef d'oeuvre et ta critique est superbe

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  5. Merci beaucoup Kév', je suis rassuré, elle m'a donnée du fil à retordre celle-ci! Oui, LAST ACTION HERO est un chef d'œuvre du Genre!

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  6. Décidément, Luke, plus tu publies d'articles, plus ils se révèlent passionnants, tu arriverais presque à me rabibocher avec ce film, je vais me le remater de suite!!!
    Et encore bravo...

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  7. Merci beaucoup Hanzo! Je sais plus où me mettre là, je ne sais pas quoi dire tellement ton commentaire me fait plaisir!
    Si de plus il t'as donné envie de redonner une chance au film alors là je suis totalement comblé! Bon film alors et merci encore, tout cela me motive grandement pour la suite ^^

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  8. Héhéhéééé, 100% d'accord Bro', j'ai kiffé ce film. Je le montrerai à mes gosses, tiens !

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