lundi 10 octobre 2011

DETROIT METAL CITY aka DETOROITO METARU SHITI de TOSHIO LEE (2008)


DETROIT METAL CITY aka DETOROITO METARU SHITI de TOSHIO LEE (2008)

Soichi Negushi, jeune provincial un peu naïf rêvant de devenir une star de la pop dans le vent, se rend à Tokyo pour y accomplir sa destinée.

Mais voilà, les choses ne tournent pas comme il le souhaiterait et il se retrouve par dépit et sous l'impulsion d'une productrice déjantée sans scrupules en lieu et place incarnant Krauser II, chanteur et leader charismatique satanique du groupe de death metal "DMC", abréviation de "Detroit Metal City", grimé et costumé de façon outrancière et vociférant des textes faisant la part belle à la Mort, l'Enfer et le Sexe, aux antipodes de ce qu'il souhaitait chanter à l'origine!

Amoureux secrètement de la belle Yuki, qui elle déteste particulièrement ce style musical, Negushi se retrouve malgré lui à vivre une double vie compliquée à gérer à son grand désarroi, espérant que cette dernière ne découvrira pas son si honteux secret... Mais les choses finissent bien évidemment par dégénérer...


Autant vous prévenir d'emblée, DETROIT METAL CITY risque de laisser beaucoup d'entre vous dans l'incompréhension totale, la stupéfaction complète, voire dans la consternation absolue tant ce dernier est particulier et pas évident à supporter en tant que spectateur lambda, du fait j'ai presque envie de dire de son côté excessivement trop original... Je m'explique!

Tiré du manga éponyme de Kiminori Wakasugi, DETROIT METAL CITY est adapté fidèlement tel quel, à la case prêt, transposition quasi identique à tous les niveaux de la version papier avec toutes les particularités lié au format qui ne passe pas forcément sur grand écran, diront certains, seulement voilà, dans le cas du film de Toshio Lee cela participe énormément à en faire un métrage atypique, délirant et au final jubilatoire mais seulement pour les spectateurs les plus curieux, prévenus et prêts à assister à un spectacle pour le moins incongru.

L'acteur Kenichi Matsuyama ( le charismatique détective "L" dans les adaptations cinématographiques de DEATH NOTE, mais également héros de celle de GANTZ ) livre ici via son jeu une version copiée collée de la version bd des personnages, en interprétant un rôle aux deux visages radicalement opposés, à savoir d'un côté l'innocent et introverti Negushi et de l'autre son alter ego métalleux et extraverti Krauser II, en passant d'un extrême à l'autre, surjouant à outrance volontairement dans les deux cas mais respectant finalement à la lettre les codes visuels du manga et ce quitte à être totalement ridicule, excessif et probablement insupportable pour la plupart des spectateurs.


Si dans un premier temps tout cela nous laisse perplexe, on finit par se laisser convaincre malgré l'absurdité  des situations et l'excès complet du jeu de Matsuyama, notamment parce que le film va jusqu'au bout de son concept délirant complétement à la masse, sans faire dans la dentelle et sans aucun recule avec le matériau d'origine.

Le script oscille de plus entre deux extrêmes pas vraiment compatibles de prime abord, et via le personnage de Negushi donne dans le fleurs bleue, le mielleux excessivement naïf pour passer à la débauche totale, la violence et la vulgarité verbale avec son deuxième visage de Krauser. Autant dire que pour apprécier ce film il faut donc tolérer les deux malgré le fossé qui sépare ces genres, avoir un peu l'esprit romantique et aimer la provocation gratuite en même temps, pas franchement évident donc de concilier les deux à l'écran et de sauter d'un "Je t'aime promenons-nous dans les bois main dans la main" à "j'ai violé ma mère et j'en***e mon père, tuons nos parents"!

Pourtant c'est là où finalement DETROIT METAL CITY devient intéressant pour le spectateur à la recherche d'originalité, en mariant pour le meilleur et pour le pire deux univers complétement opposés, et en poussant un début de réflexion sur le sujet de la tolérance, car mine de rien le film s'offre une jolie morale sur l'acceptation de ce que l'on ne comprend pas, la peur engendrée par ce qui nous est étranger, même si tout cela est noyé dans une narration frappadingue, des situations absurdes à l'humour typiquement japonais hérité de la culture manga que peu d'Occidentaux apprécieront et comprendront.


Dans un premier temps, on pourrait d'ailleurs hâtivement penser que le film conspue le death métal et ses
adeptes, Negushi détestant la violence et la vulgarité rejette en bloc paradoxalement ce qu'il est obligé de représenter en incarnant Krauser, l'idole grandissante de la scène death metal de Tokyo, sorte de leader malgré lui de toute une jeunesse qui se complait dans le satanisme et le sexe de façon primaire, bestiale et violente, bref tous les clichés poussifs associés habituellement à ce genre musical par les profanes.

Mais en réalité cette suite d'a priori est ici utilisée pour aborder le sujet en sens inverse, car si on regarde bien, Negushi ainsi que les interprètes de variété de manière générale et les fans de pop sucrée nous sont aussi décrits avec beaucoup de raccourcis expéditifs, montrés comme des gens efféminés, niais et à la joie de vivre excessivement utopique...

Negushi est donc tour à tour le symbole de deux visions à l'imagerie qui prêtent souvent à beaucoup de manque de tolérance, à savoir d'un côté un adorateur de variété à la mode demeurée et un peu neuneu, et de l'autre un monstre de foire satanique obscène et infréquentable, mais dans les deux cas la critique est ici constructive puisqu'il s'agit de nous faire comprendre que si on n'adhère pas forcément à un style particulier il n'en reste pas moins que d'autres personnes eux s'y retrouvent sainement avec bonheur et même se faisant rêve grâce à cela.


C'est cette partie qui touche au cœur notamment lors de jolies scènes touchantes faisant intervenir la mère compréhensive et aimante du héros, quand les masques tombent enfin, que Negushi malgré l'incompréhension de l'univers qu'il représente malgré lui avec un certain talent inné se rend compte que ses fans, eux, y trouvent un échappatoire salutaire et vital, une porte vers le rêve, un exutoire qui leur permet de fuir la réalité si rigide.

Il va alors finir par accepter sa condition d'icône, embrasser sa responsabilité vis-à-vis de ses fans et même se battre pour que ces derniers puissent continuer à rêver à travers Krauser II dans une séquence haute en couleur où il affronte musicalement le légendaire Gene Simmon (méconnaissable d'ailleurs! ), un juste retour des choses puisque l'auteur du manga s'est fortement inspiré de KISS pour créer son personnage de Krauser!

Pour ma part, je trouve DETROIT METAL CITY tellement barré et déconcertant que j'y ai trouvé mon plaisir, pas forcément pendant la projection d'ailleurs, mais après, en y repensant le lendemain, en me disant que ce film ne ressemble finalement à aucun autre, qu'il a son propre style, sa propre identité aussi absurde et excessif que cela puisse paraître, une sorte de HANNAH MONTANA trash qui évite le formalisme de ce genre de production pourtant à l'origine destinée à un public jeune ( Kenichi Matsuyama étant une star auprès de la population féminine Japonaise ), maladroit dans sa construction narrative certes, pas forcément délicat avec sa vulgarité qui tranche avec les paroles sirupeuses des chansons favorites de Negushi oui, mais tellement surréaliste qu'on ne l'oubliera pas de si tôt!


Une fois de plus, les fans du manga ont très largement rejetés en bloc cette adaptation ( à commencer par les lecteurs nippons et français) considérant que tout cela est ridicule transposé tel quel, reprochant sa trop grande fidélité à l'œuvre d'origine, ces même fans qui critiquent l'exact inverse concernant d'autres adaptations manga...Mais je les comprends tout de même en un sens, tant DETROIT METAL CITY peut excéder, dépasser les bornes du cabotinage et le seuil de tolérance de bien des spectateurs et ce dès ses premières minutes.

Oui, DETROIT METAL CITY est un film qui peut parfois tourner au ridicule et au grotesque complet mais il y va à fond, et a le mérite de livrer un spectacle totalement inédit et farfelu, outrancièrement foutraque dans sa mise en forme visuelle et narrative à travers le jeu de son interprète principal et c'est tant mieux, car c'est ce qui fait qu'il restera à jamais une expérience singulière, unique en son genre, à part, que l'on y adhère ou pas!


NOTE GLOBALE : 12/20 lors de son premier visionnage et 15/20 le lendemain, pour l'originalité particulière que présente le film lorsqu'on y repense!

Luke Iron Mars

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