HACHI : A DOG'S TALE aka HACHIKO : A DOG'S STORY de LASSE HALLSTRÖM (2009)
(Cette critique contient de nombreux spoilers, mais dans le cas présent à mon sens, cela ne nuis aucunement à l'expérience émotionnelle que nous propose HACHI, pour preuve, je connaissais déjà l'histoire du véritable Hachiko avant de voir le film. Néanmoins, si vous souhaitez garder la surprise intacte de la découverte, veuillez en tenir compte et ne pas lire la partie indiquée par la mention "SPOILER")
Un soir, alors qu'il revient de voyage tardivement, Parker Wilson (Richard Gere), professeur de musique à l'université, va trouver sur son chemin un jeune chiot vraisemblablement perdu.
Ne trouvant personne pour prendre en charge l'animal, il va le ramener chez lui, au risque de se confronter à sa femme Cate (Joan Allen) qui refuse instamment d'avoir un animal de compagnie à la maison.
Les jour suivants, il va s'affairer à retrouver l'éventuel propriétaire de Hachinko, nom qui lui est assigné du fait de l'idéogramme gravé sur le collier que le chiot, un Akita Inus, porte autour du cou, signifiant simplement qu'il est le huitième de sa portée et signe de prospérité au Japon d'où il semble provenir.
Mais le temps passant, et ses recherches restant infructueuses, Parker se met à s'attacher naturellement à ce nouveau petit compagnon avec qui il va nouer des liens de plus en plus forts, basés sur un échange et un respect réciproque.
Mais un triste événement va malheureusement venir frapper cette amitié indéfectible...
La catégorie des films familiaux est souvent hâtivement jugée, dénigrée et méprisée par les cinéphiles, considérant cette dernière comme réservée au grand public (et ça c'est mal!!!), sans intérêts artistiques (chaque film doit révolutionner le cinéma sinon c'est nul!), réduites à des divertissements calibrés pour satisfaire le plus grand nombre faisant souvent appel à des méthodes faciles et émotionnellement parlant à la démarche malhonnête, hypocrite et politiquement obligatoirement correctes.
C'est pourtant le public dans sa globalité justement qui fait perdurer dans le temps la notoriété des œuvres cinématographiques, leur confère un statut de grand classique dans certains cas même, et cela, nous, cinéphiles soit disant éclairés, nous avons (trop) souvent tendance à l'oublier.
Heureusement, de temps à autre, un film vient nous rappeler à l'ordre, et par sa simplicité, avec beaucoup d'humilité vient désarçonner nos idées reçues pour démontrer qu'une histoire tout public ne signifie pas être automatiquement mauvaise ou indigne d'intérêt pour autant... Bien au contraire.
HACHI fait partie de ces métrages.
Basé sur la véritable histoire d'Hachiko qui s'est déroulée au Japon en 1923 et transposée ici à notre époque, HACHI dans sa première partie nous entraîne donc dans une rencontre inopinée entre un petit chiot et son futur maître, Parker un professeur universitaire à la vie familiale harmonieuse, en passant par tous les clichés liés au sujet, mais sans tomber dans le racolage malhonnête au contraire de nombre de films de sa catégorie faisant intervenir des animaux de compagnie, en évitant religieusement de donner dans la niaiserie et la mièvrerie.
C'est tout d'abord sa bonne conscience qui va obliger Parker à garder Hachiko, qui ne peut se résoudre à abandonner le jeune chiot à la fourrière surchargée du coin et ce contre l'avis de sa femme pas franchement enthousiasmée par l'idée de l'adopter, l'obligeant à le laisser dans un cabanon aménagé au fond du jardin les premiers soirs, le temps de trouver une solution.
Mais un lien, une connection quasi spirituelle les lie déjà et ce sans qu'ils le sachent, et de fil en aiguille comme on pouvait s'y attendre, Hachi trouve naturellement sa place au sein de cette famille, en devient un membre à part entière.
Le métrage s'évertue alors sobrement à développer cette complicité mutuelle, les découvertes liées à ce nouveau compagnon, ses démonstrations d'affections particulières et ses rapports privilégiés intenses qu'il partage avec son maître fasciné par son comportement émotionnel unique en son genre, notamment lorsque Hachi se met avec une spontanéité déconcertante à accompagner Parker quotidiennement à la gare, le regarde partir puis rentre et revient le soir se tenir sur la place qui fait face à la station pour l'accueillir à son retour.
Rien d'exceptionnel vous dites-vous, et vous avez raison. L'histoire nous montre avec beaucoup de simplicité l'adoption et l'amitié naissante entre ce chien et son maître, situation ô combien familière et similaire à ce que nombre de personnes connaissent et vivent eux-même avec leurs animaux de compagnie, telle quelle, ni plus ni moins, sans effets superflus, très sobrement, installant de ce fait l'attachement mutuel qui naît de cette rencontre presque prédestinée.
Ces premiers contacts surprendront immédiatement les cinéphiles plus expérimentés qui ne pourront que rester interloqués devant la présentation sommaire faite des personnages humains, le canidé étant ici placé au centre de la narration, le réalisateur s'appuyant essentiellement sur des situations contemporaines triviales pour décrire le train-train de Parker et des Wilson (le départ au travail avec son lot de geste habituels, les relations avec son entourage direct et occasionnel, les changements dans le cercle familiale dus à la vie, etc. etc) ce petit Hachi, comme dans beaucoup de cas, embellit juste un peu plus la vie de son ami, et l'aide à s'épanouir davantage au sein de la structure familiale déjà très stable dont il est le patriarche, bref, des tranches de la vie complètement reconnaissables et courantes de notre quotidien.
ATTENTION SPOILER
C'est dans sa deuxième partie que ce début somme toute classique et qui semble si commun prend toute sa justification, lorsque le destin frappe sans prévenir, que la Mort s'abat sur Parker, le foudroyant brutalement alors qu'il donne un cours à l'université.
Cette événement dramatique, traité avec beaucoup de sobriété à l'écran en quelques plans évocateurs représentatifs et qui évitent soigneusement les effets larmoyants pourtant propices, va nous faire vivre, via la réaction du chien confronté à cette séparation imposée par le destin, une des expériences émotionnelles les plus éprouvantes et bouleversantee rarement vécues sur un grand écran.
Non seulement ce dernier n'accepte pas d'être pris en charge par d'autres personnes (à savoir la fille du défunt et son compagnon pourtant prévenants envers l'animal) mais il refuse obstinément d'oublier son maître de cœur, et n'a de cesse d'espérer son retour, retournant l'attendre inlassablement sur cette fameuse place de la gare, fixant avec espoir les portillons du bâtiment ferroviaire, scrutant le manège des passagers qui défilent, et ce trains après trains, jusqu'à la tombée de la nuit, jour après jour, sans défaillir, déterminé vaille que vaille à être là prêt à accueillir son maître pourtant décédé, devant les habitués de l'endroit (les usagers, commerçants du coin et responsables de gare) totalement médusés devant autant de dévotion.
Ces derniers auront beau tenter de lui faire comprendre à plusieurs reprises que son maître ne reviendra plus, rien ni fait, rien ne viendra briser ce lien qui pousse Hachi à rester assis là, habité par une loyauté absolue, et ce, qu'il vente, pleuve ou neige, saison après saison, dans l'attente de revoir le seul qui puisse lui donner une authentique satisfaction affective, porté par le souvenir immuable de sa complicité exceptionnelle avec son maître emporté par la mort.
Les dernières séquences, faisant notamment intervenir la femme de Parker revenue se recueillir sur la tombe de son ancien mari, touche au cœur avec une rigueur respectueuse envers le public et cette histoire bouleversante, et se conclut dans un final absolument magnifique et libérateur, après neuf années où Hachiko s'évertuera à tenir son engagement sans jamais fléchir...
On pourrait légitimement s'attendre lors de ces passages à des excès mélodramatiques, mais le film réussit le tour de force de nous raconter une histoire poignante sans jamais tomber dans la facilité gratuitement larmoyante, en nous racontant les faits avec beaucoup de retenue visuelle et narrative et en exploitant la musique (composée par Jan A.P. Kaczmarek et essentiellement interprétée au piano) avec beaucoup de justesse, les faits parlant d'eux-mêmes et n'ayant aucunement besoin d'être appuyés par des effets de style quelconques et superflus.
C'est là où tout le savoir-faire du réalisateur Lasse Hallström fait la différence, dans son approche intelligente du sujet, en optant pour le point de vue d'Hachiko, en nous mettant à sa place dès le début du film, via des saynètes de prime abord conventionnelles mais installant par ce biais immédiatement la vision des choses selon Hachi, parfois simplement en nous montrant en vue subjective, à travers ses yeux, la façon dont il perçoit les événements.
Richard Gere, acteur consensuel extrêmement populaire auprès du grand public et totalement dénigré par les cinéphiles, s'efface ici avec beaucoup de talent et d'humilité, se met concrètement au service de l'histoire et devient presque le faire-valoir de ce compagnon à quatre pattes, comprenez qu'il tient ici finalement le second rôle volontairement, mettant son statut de star de côté au profit de celui de Hachiko.
Exemplaire de la part de l'acteur et intelligent de voir un tel traitement à l'image, admirable d'avoir su comprendre et accepter qu'ici le héros, le seul et unique est l'animal et sa noblesse d'âme, cette dévotion indéfectible et sincère, ce symbole de loyauté absolue.
C'est cette sincérité irréprochable qui rend ce film unique en son genre, et ce à tous les niveaux, dans son approche volontairement sobre, dans cette volonté continuelle de ne pas vouloir faire pleurer dans les chaumières mais d'être un simple témoignage cinématographique de ce légendaire exemple de fidélité et de droiture, de restituer toute la beauté de cette histoire vraie en respectant de plus l'origine des faits en insérant habilement les valeurs liées à la culture japonaise afin de les intégrer à cette version à destination de l'Occident.
La statue érigée en mémoire de Hachiko devant la gare de Shibuya |
Dans un monde où la fidélité et l'amitié sincère se font de plus en plus rare, ou le dévouement et la loyauté sont des valeurs qui se perdent et sont même considérés comme des signes de faiblesse dans notre société soit-disante civilisée prônant de plus en plus l'individualisme et la réussite par l'écrasement systématique de nos semblables, l'histoire d'Hachiko devient un modèle d'exemple dont on devrait tous s'inspirer humblement.
Le film de Lasse Hallström via des séquences de prime abord anodines nous montre que les êtres humains restent bien souvent d'une nature favorisant les relations par intérêt au contraire des animaux dont l'amour ne s'achète pas, en nous montrant Hachiko qui de son propre chef refusera le confort d'un nouveau foyer pour respecter son engagement, ne laissera ni la faim, ni les intempéries écorner sa fidélité et sa loyauté envers son ami, pour respecter sa mémoire et refuser d'oublier celui qui dans un échange sincère le considérait comme son égal.
HACHI prouve aussi qu'il faut savoir en tant que cinéphile chevronné faire preuve de moins d'a priori envers certains film, de ne pas avoir la science infuse, de constamment faire preuve de curiosité afin de ne pas passer à côté de petites perles d'émotion pure comme ce film incontournable et que je vous pousse avec beaucoup d'insistance à voir absolument.
Vous verrez, parfois pleurer à chaudes larmes fait un bien fou et nous permet de prendre la vie avec beaucoup plus de flexibilité et de revenir à l'essentiel : sans amour nous ne somme rien que des coquilles vides.
Une des photos d'époque du véritable Hachiko |
NOTE GLOBALE : 18/20
DÉDICACE PERSONNELLE À MES AMIS BRUNO DUSSART ET ISABELLE ROCTON, AINSI QU'A HARVEY, BARNEY ET BIEN SUR CHAUSSETTE, ET A LEUR AMITIÉ INDÉFECTIBLE ENVERS NOUS ET CE JUSQU'À LEUR DERNIER SOUFFLE... À LA MÉMOIRE D'HACHIKO
VOICI LE LIEN DE LA BELLE CRITIQUE DE BRUNO SUR SON BLOG STRANGE VOMIT DOLLS : http://brunomatei.blogspot.com/2011/11/hatchi-hachi-dogs-story.html
Notez qu'en France, pour une raison que j'ignore, le nom du célèbre chien et de se fait le titre du film a été modifié et est donc disponible en blu ray et dvd sous le nom de "HATCHI", avec un"T".
Luke Iron Mars